Ce qui devait ĂȘtre une campagne joyeuse, pleine de nostalgie et de kawaii, sâest transformĂ© en un vĂ©ritable fiasco.

McDonaldâs Japon, en partenariat avec la franchise PokĂ©mon, a voulu sĂ©duire les fans en distribuant des cartes Ă collectionner dans ses cĂ©lĂšbres Happy Set.
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Mais le succĂšs a rapidement virĂ© Ă la polĂ©mique, rĂ©vĂ©lant les limites dâune opĂ©ration mal calibrĂ©e dans un pays trĂšs sensible au gaspillage alimentaire.
đŻ Quand marketing rime avec prĂ©cipitation
Du 9 au 11 aoĂ»t 2025, McDonaldâs Japon lançait une Ă©dition spĂ©ciale de son Happy Set avec deux cartes PokĂ©mon incluses, dont une carte Pikachu garantie. Lâobjectif Ă©tait clair : toucher la corde sensible des fans de la premiĂšre heure et des jeunes enfants attirĂ©s par la magie de PokĂ©mon. Le rĂ©sultat fut immĂ©diat : les restaurants ont Ă©tĂ© pris dâassaut dĂšs lâaube, les stocks Ă©puisĂ©s dĂšs le premier jour, et les files se sont multipliĂ©es Ă travers tout lâarchipel.
Pourtant, une limite de cinq menus par personne avait Ă©tĂ© prĂ©vue. Cela nâa pas empĂȘchĂ© certains acheteurs de multiplier les passages ou de faire le tour de plusieurs Ă©tablissements pour accumuler les cartes.
TrĂšs vite, des images ont circulĂ© sur les rĂ©seaux : plateaux pleins laissĂ©s sur les tables, sacs de repas intacts abandonnĂ©s ou jetĂ©s, uniquement pour rĂ©cupĂ©rer les cartes. Une scĂšne difficile Ă digĂ©rer dans une culture oĂč le gaspillage, le mottainai, est profondĂ©ment mal vu.
đ„ Une vague de colĂšre portĂ©e par les rĂ©seaux
Au Japon, la figure du revendeur â le tenbai-ya â suscite dĂ©jĂ une forte hostilitĂ©. Ces personnes achĂštent en masse des produits populaires pour les revendre Ă prix fort. Dans le cas de McDonaldâs, lâindignation a explosĂ© : non seulement certains achetaient dans lâunique but de revendre les cartes, mais en plus, ils jetaient la nourriture sans mĂȘme lâouvrir.

Face Ă la tempĂȘte mĂ©diatique et aux critiques grandissantes, McDonaldâs Japon a publiĂ© un communiquĂ© officiel le 11 aoĂ»t. La marque y reconnaĂźt un manque de prĂ©paration, condamne fermement les achats Ă des fins de revente et surtout le gaspillage des aliments. Elle prĂ©sente ses excuses aux clients, au personnel et aux riverains affectĂ©s par le chaos dans les restaurants.
đŠ Mercari en ligne de mire
DĂšs le 7 aoĂ»t, McDonaldâs avait pourtant annoncĂ© une coopĂ©ration avec Mercari, la principale plateforme de revente japonaise. LâidĂ©e Ă©tait de surveiller les annonces problĂ©matiques, de partager les informations et dâĂ©viter que les cartes ne soient revendues Ă prix fort.
Mais malgré ces efforts, des dizaines de listings de cartes ont rapidement envahi la plateforme, avec des prix parfois décuplés.
Ce partenariat, qui se voulait rassurant, a finalement été perçu comme insuffisant voire cosmétique. La spéculation avait déjà commencé bien avant que les garde-fous soient activés.
Pour la deuxiĂšme vague de lâopĂ©ration, du 15 au 17 aoĂ»t, McDonaldâs a dĂ©cidĂ© de retirer les cartes de la distribution. Ă la place, des figurines PokĂ©mon ont Ă©tĂ© proposĂ©es. De nouvelles rĂšgles plus strictes ont Ă©tĂ© mises en place : trois Happy Set maximum par groupe et par passage, y compris pour les commandes en ligne ou en livraison. Les restaurants ont mĂȘme Ă©tĂ© autorisĂ©s Ă refuser la vente en cas de comportement dĂ©placĂ© ou suspect.
Ce changement visait Ă calmer lâambiance dans les Ă©tablissements, Ă casser la dynamique spĂ©culative et Ă ramener un minimum de sĂ©rĂ©nitĂ© dans cette opĂ©ration estivale qui avait dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©.
đž Le vrai trĂ©sor, ce nâest pas le burger⊠mais la carte
La frĂ©nĂ©sie sâexplique par lâessor spectaculaire du marchĂ© des cartes Ă collectionner au Japon. En 2023, ce marchĂ© a atteint un record de 277,4 milliards de yens, tous Ă©diteurs confondus. Les cartes PokĂ©mon en sont le principal moteur. Dans ce contexte, il nâest pas surprenant de voir des adultes foncer chez McDo pour obtenir une carte exclusive de Pikachu, dans lâidĂ©e de la revendre aussitĂŽt.
Ce phĂ©nomĂšne dĂ©passe largement le cadre dâune simple opĂ©ration marketing. Il met en lumiĂšre un modĂšle Ă©conomique parallĂšle basĂ© sur la raretĂ©, la spĂ©culation, et la recherche du profit rapide.
đĄïž Ce que McDonaldâs aurait pu faire
Face Ă ce type de dĂ©rapage, plusieurs solutions concrĂštes auraient pu ĂȘtre mises en place pour limiter les abus. Une rĂ©servation nominative via un QR code unique par client, des cartes remises seulement Ă la fin du repas sur prĂ©sentation du plateau vide, ou encore une distribution alĂ©atoire Ă des heures imprĂ©visibles pour casser lâeffet de ruĂ©e sont des pistes viables.
On pourrait aussi imaginer des quotas ajustĂ©s selon lâaffluence du restaurant et une modĂ©ration plus active sur les plateformes de revente, avec des listes noires partagĂ©es.
Certaines de ces mesures ont commencĂ© Ă ĂȘtre mises en Ćuvre, mais la vraie question est de savoir si elles seront maintenues sur le long terme.
Lâaffaire McDonaldâs x PokĂ©mon dĂ©passe la simple polĂ©mique alimentaire. Elle met en lumiĂšre des dynamiques profondes du Japon contemporain : lâimportance du respect des rĂšgles, lâaversion pour le gaspillage, et les tensions croissantes entre culture fan et dĂ©rives commerciales.
En allumant lâĂ©tincelle avec un Pikachu exclusif, McDonaldâs a involontairement dĂ©clenchĂ© une rĂ©action en chaĂźne dans un baril de poudre dĂ©jĂ bien rempli. En 2025, la communication kawaii ne suffit plus !
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