La minimisation des crimes de guerre de l’impérialisme japonais après la guerre est un phénomène de révisionnisme encore bien vivant au Japon…
Les atrocités commises par l’armée japonaise tomberont elles un jour dans l’oubli au Japon ?
Selon Jeff Kingston, directeur des études asiatiques de l’université Temple de Tokyo : « Les révisionnistes japonais aspirent à réécrire l’histoire de l’expansion militariste du Japon en Asie et brandissent pour se disculper un nouveau récit qui fait fi de ce qui s’est passé »
Ces vues restent heureusement minoritaires dans la société japonaise. Elles n’ont pas un écho puissant parmi les Japonais qui sont conscients des dangers qu’elles peuvent créer dans une région déjà sous tensions.
Le révisionnisme gagne-t-il du terrain au Japon ?
Il est difficile de répondre à cette question… Certains révisionnistes japonais contemporains sont très suivis, Katsuya Takasu nie par exemple l’existence d’esclavage sexuelle par le Japon impérial ou encore Yuko Iwanami qui explique que l’invasion de la Chine par le Japon (et la Seconde Guerre mondiale elle-même) étaient des réactions justifiées à l’impérialisme occidental raciste d’alors.
Par ailleurs le phénomène touche certains législateurs du Parti libéral démocrate. Ils ont cherché plusieurs fois à réviser les excuses présentées par Yohei Kono (河野 洋平) aux anciennes femmes de réconfort en 1993.
Pire, en 2007, le premier ministre japonais Shinzo Abe nia que l’armée ait forcé les femmes à l’esclavage sexuel pendant la guerre, en déclarant qu’il n’y avait pas de preuve qu’il y ait eu coercition. Il avait d’ailleurs dirigé la Société japonaise pour la réforme des manuels d’histoire et a dirigé l’antenne du Nippon Kaigi à la Diète, deux entités ouvertement révisionnistes niant les crimes de guerre japonais.
Même les médias, dont la télévision nationale NHK, sont impliqué par ces positions révisionnistes. Dans un document interne que le quotidien britannique Times s’est procuré, des consignes strictes ont été données aux journalistes des services anglophones de la NHK : pour parler de des femmes forcées à se prostituer, les journalistes anglophones de la NHK devaient recourir exclusivement à la notion de comfort women, soit des femmes de réconfort. «La prostitution», «les prostituées», «les esclaves sexuels», «les bordels» étant bannis de la NHK.
Le combat est toujours actuel, récemment la Chine a versé au Registre de la mémoire du monde de l’Unesco des documents qui attestent du massacre de Nankin. Pour le gouvernement japonais, qui conteste l’authenticité des documents, « l’incident » de Nankin n’est qu’une péripétie de la guerre. Dans ce contexte, le Japon a d’ailleurs menacé de réduire sa contribution à l’Unesco (dont il fournit 10 % du budget).
Le sanctuaire Yasukuni
Voilà un lieu au cœur de ce problème révisionniste japonais… Le sanctuaire de Yasukuni avait été créé comme le symbole de la réconciliation entre Japonais l’année qui suivit la restauration de l’ère Meiji lorsque les partisans de l’Empereur l’emportèrent sur ceux du Shogun.
Le sanctuaire accueille les âmes des morts en tant que kami et tout acte mauvais ou immoral commis par le défunt est pardonné lors de l’entrée au sanctuaire.
Selon la tradition shinto, ce sanctuaire était un lieu de pèlerinage pour commémorer l’âme des guerriers morts, indifféremment du camp pour lequel ils avaient choisi de combattre. De nos jours le sanctuaire Yasukuni (靖国神社) est considéré un bastion du révisionnisme au Japon.
Il est aujourd’hui en parti dédié aux personnes mortes au combat en servant l’empereur du Japon au cours des différents conflits de 1867 à 1951.
Les prêtres du sanctuaire ont une indépendance religieuse totale pour décider du choix de l’entrée des défunts. Sur près des 2,5 millions de personnes répertoriées dans le Livre des âmes du sanctuaire, plus de 1000 ont été condamnées pour crimes de guerre par un tribunal d’après 1945. La consécration est permanente et irréversible.
Le lieu gère aussi le Yushukan (遊就館), un musée historique retraçant l’histoire militaire du Japon depuis la fin du XIXème avec un point de vue particulier pour qui connait bien la période :
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