Il était une fois… une lumière dans un bambou. Et dans cette lumière, une petite fille.
Un rêve ? Non, un conte millénaire. Celui de Kaguya-hime, la princesse venue de la Lune, dont l’histoire traverse les âges pour nous parler encore aujourd’hui de beauté, de perte, et de l’éphémère.
✨ Une apparition surnaturelle dans le quotidien
Par une nuit calme, un humble coupeur de bambou découvre une minuscule fille, lumineuse comme un éclat d’astre, nichée dans une tige. Il la ramène chez lui, l’élève comme sa fille. Très vite, Kaguya-hime grandit — littéralement et spirituellement. Sa beauté devient inégalée, presque douloureuse à regarder. Tout ce qui l’entoure semble terne en comparaison.
C’est alors que surgissent les prétendants. Cinq nobles arrogants, certains de leur pouvoir et de leur charme, tentent de la conquérir. Mais Kaguya n’est pas dupe. Pour se débarrasser d’eux sans heurt, elle leur confie des tâches impossibles : des objets légendaires, inexistants. Tous échouent. L’un y laisse même la vie.
💔 L’amour refusé et l’adieu à la Terre
Un seul homme semble sincère : l’empereur du Japon. Touché par Kaguya, il tente de la convaincre. Elle, les larmes aux yeux, lui murmure une vérité déchirante : elle ne vient pas d’ici. Elle appartient à la Lune, envoyée pour un temps limité. Son séjour touche à sa fin.
À l’approche de l’automne, ses pleurs sous la pleine lune deviennent plus fréquents. Et puis une nuit, des êtres célestes descendent du ciel. Impuissants, les gardes ne peuvent rien faire. Elle laisse une lettre, une fiole d’élixir d’immortalité, et disparaît dans une lumière silencieuse.
L’empereur, bouleversé, refuse l’élixir. Sans elle, à quoi bon vivre pour toujours ? Il ordonne qu’on brûle la lettre et l’élixir au sommet de la plus haute montagne du pays. Le Mont Fuji. Depuis, dit-on, sa fumée continue de monter vers la Lune.
🌸 Beauté, impermanence et détachement
Ce conte n’est pas seulement une romance tragique. Il s’inscrit profondément dans la philosophie japonaise du mono no aware — cette douce mélancolie face à la beauté qui passe. Kaguya est l’incarnation parfaite de ce sentiment : un être radieux, insaisissable, destiné à repartir.
Les prétendants, l’empereur, les objets mythiques… tout cela échoue face à une vérité simple : on ne possède jamais ce qui ne nous appartient pas. Kaguya nous rappelle qu’aimer, c’est parfois laisser partir. Même la beauté la plus sublime n’est qu’un passage.
Le Conte du coupeur de bambou, datant du IXᵉ ou Xᵉ siècle, est l’un des premiers récits de la littérature japonaise. Il est à la fois conte, poème, et méditation. Sa portée dépasse le simple divertissement : il façonne des montagnes, influence l’imaginaire et révèle la vision japonaise du monde.
- Le Mont Fuji devient plus qu’un sommet : un lieu de mémoire, un symbole d’amour impossible.
- La Lune, loin d’être une étrangeté scientifique, est ici un refuge spirituel, un monde pur où les émotions terrestres ne peuvent subsister.
- Le sacré dans cette histoire est intime, mélancolique, et indissociable de la nature.
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