Les cerfs de Nara Park sont officiellement issus d’une lignée génétique millénaire !
La génétique peut-elle déterminer la valeur spirituelle d’un animal ou son droit à la protection ?
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À Nara au Japon, les cerfs shika bénéficient d’une protection depuis plus de mille ans en raison de leur statut sacré dans le shintoïsme.
Depuis plusieurs centaines d’année, à la tombée du jour, le son d’une trompette attire des centaines de cerfs, venus se nourrir de biscuits donnés par les touristes. Bien que les 1 200 cerfs du parc soient techniquement sauvages, leur relation spéciale avec les humains remonte à plus d’un millénaire.
La zone naturelle peu développée, abritant de multiples monuments religieux, a depuis lors protégé les cerfs sacrés de la chasse.
Dans le parc du sanctuaire shinto Kasuga Taisha 春日大社, sanctuaire tutélaire de la famille Fujiwara, les cerfs sont vénérés comme des êtres divins et sacrés. Cette protection date de l’époque à laquelle Takemikazuchi-no-mikoto, une divinité de la mythologie japonaise, est dit avoir fait son apparition sur le mont Mikasa monté sur un cerf blanc.
🦌 Les cerfs de Nara, entre Conflits et Conservation
Malgré leur sanctuaire, les cerfs ne restent pas toujours dans les limites protégées. Au cours des cinquante dernières années, leur nombre a explosé, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de la zone protégée.
Hors du sanctuaire, les agriculteurs considèrent souvent les cerfs comme nuisibles, bien qu’ils restent spirituellement et culturellement significatifs et qu’ils constituent une attraction majeure pour les touristes.
En 1985, face aux plaintes des agriculteurs, le gouvernement national a divisé la ville de Nara en zones protégées et gérées pour les cerfs, autorisant dans ces dernières le contrôle de la population par abattage, bien que cela n’ait pas encore eu lieu, les locaux craignant de repousser les visiteurs.
🦌 Une Récente Question de Génétique Qui Rebat Les Cartes
Une étude, dirigée par le professeur agrégé Shingo Kaneko et co-rédigée avec le Dr Toshihito Takagi et Harumi Torii, ancien professeur à l’Université d’éducation de Nara, a été publiée dans le « Journal of Mammalogy » en 2023. Elle explore les implications génétiques de la longue protection des cerfs dans le parc de Nara, en comparaison avec d’autres populations régionales.
L’analyse a révélé 18 haplotypes différents au sein de l’ADN mitochondrial, indiquant une faible diversité génétique entre les groupes, mais avec un haplotype unique (S4) détecté autour du sanctuaire Kasuga Taisha. Ce groupe présente une continuité génétique remarquable, soulignant un isolement probable dû à une moindre migration des femelles.
Les cerfs de Nara semblent s’être détachés de leurs ancêtres il y a environ 1 400 ans, coïncidant avec la fondation du sanctuaire Kasuga Taisha. Cette séparation ancienne a été préservée principalement grâce aux pratiques de protection religieuse, permettant à ces cerfs de maintenir un pool génétique distinct malgré les pressions extérieures telles que la chasse et l’urbanisation.
La lignée génétique unique des cerfs à l’intérieur de la réserve pourrait être menacée par le mélange avec les populations de cerfs environnantes. Cette recherche, publiée dans le Journal of Conservation Science and Practice, montre que les cerfs du parc de Nara sont génétiquement distincts des populations environnantes, préservant l’ADN de leurs ancêtres sacrés.
Cette information génétique pourrait influencer la manière dont les habitants de Nara valorisent les différentes populations de cerfs, tant sur le plan spirituel que culturel, et pourrait jouer un rôle dans la gestion des populations croissantes de cerfs à l’intérieur et à l’extérieur de la réserve pour protéger cet héritage génétique unique.
Avec les dernières données génétiques misent sur la table, les habitants de Nara réfléchissent désormais non seulement à la longue lignée de l’animal, mais aussi à ce qu’ils feront pour la préserver demain.
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