Laissez-vous guider dans cette célébration où le sacré embrase littéralement la nuit de l’ancienne capitale de Nara…

Imaginez un temple ancestral plongé dans l’obscurité, où des moines courent sur un balcon de bois en brandissant d’immenses torches de feu, projetant une pluie d’étincelles sur une foule silencieuse.
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Ajoutez à cela une eau sacrée qui jaillit mystérieusement une seule nuit par an… Bienvenue au Shuni-e, également connu sous le nom d’Omizutori, un festival japonais vieux de plus de 1250 ans, qui mêle rituels de feu et d’eau dans une ferveur mystique inégalée.
Chaque mois de mars, dans le cadre majestueux du temple Tōdai-ji à Nara, le Shuni-e transforme la ville en théâtre de spiritualité et de spectacle.
🕰️ Un festival né il y a douze siècles
Le Shuni-e voit le jour en l’an 752, instauré par le moine Jitchū, disciple du fondateur du Tōdai-ji, en l’honneur de Kannon, divinité bouddhique de la compassion. Il s’agit à l’origine d’un rite de repentance, destiné à purifier le peuple et protéger la nation des calamités.
Son nom, Shuni-e, signifie « cérémonie du deuxième mois » (selon l’ancien calendrier lunaire). Le terme Omizutori, littéralement « puisage de l’eau », désigne plus spécifiquement le point culminant de la cérémonie, dans la nuit du 12 au 13 mars.
Au fil du temps, cette cérémonie est devenue un rituel collectif de purification spirituelle, célébré sans interruption depuis sa création — un exploit qui témoigne de la résilience des traditions japonaises.
Et comme souvent dans les rituels anciens, les légendes abondent : celle de l’eau miraculeuse offerte par un dieu arrivé en retard, ou encore le rêve mystique de Jitchū dans le paradis de Tusita, qui inspira ce rituel céleste…
🏯 Nigatsu-dō
C’est dans le pavillon Nigatsu-dō du temple Tōdai-ji que se joue ce drame mystique. Construit en 772 sur une colline dominant le parc de Nara, ce bâtiment de bois offre une vue imprenable sur la ville et devient, chaque soir de mars, un véritable brasier suspendu.
L’ambiance y est saisissante : les torches enflammées, les chants sacrés, le froid de la nuit… Un contraste sensoriel où le feu réchauffe les corps autant que les âmes.
Même les célèbres daims de Nara s’éclipsent à distance devant le tumulte inhabituel, laissant place à la ferveur humaine dans ce spectacle à la fois mystique, théâtral et profondément spirituel.
🔥 Otaimatsu
Chaque soir du 1er au 14 mars, à la tombée de la nuit, le rituel du feu appelé Otaimatsu embrase le balcon du Nigatsu-dō. Des moines – ou plutôt des porteurs appelés dōji – brandissent des torches géantes pouvant mesurer jusqu’à 8 mètres et peser 80 kg.
Ils courent le long du balcon, laissant jaillir une pluie d’étincelles sur les spectateurs. Celles-ci ne sont pas de simples effets pyrotechniques : selon la tradition, quiconque est touché par une étincelle sera protégé pour l’année.
Le moment le plus attendu a lieu le 12 mars, où les torches sont plus nombreuses, plus longues, plus spectaculaires. Ce soir-là, la foule afflue, l’atmosphère est électrique. Et quand toutes les torches s’embrasent en même temps, le Nigatsu-dō devient un soleil suspendu dans la nuit.
💧 Omizutori
Après la purification par le feu, vient celle par l’eau. Dans la nuit du 12 au 13 mars, vers 2h du matin, les moines descendent au puits Wakasa-i, situé au pied du Nigatsu-dō, pour y puiser l’eau miraculeuse.
Selon la croyance, cette eau arrive chaque année de la ville d’Obama (préfecture de Fukui), où une autre cérémonie, l’Omizu-okuri, l’aurait mise en route dix jours plus tôt. Une sorte de relais spirituel aquatique à travers le Japon souterrain.
Les moines recueillent l’eau, la consacrent, puis la distribuent aux fidèles, chacun buvant une gorgée censée posséder des vertus curatives et protectrices.
Deux jarres symbolisent le lien entre passé et présent : l’une contient un peu d’eau de chaque Omizutori depuis 752 (!), l’autre accueille l’eau fraîchement puisée de l’année. Ainsi, la continuité sacrée du rituel est préservée, goutte après goutte.
🌸 Après le feu et l’eau, vient le printemps
Quand la cérémonie touche à sa fin, le silence retombe sur Nara. Le ciel s’éclaircit peu à peu, et avec lui arrive le printemps officiel. On dit que les premiers cerisiers en fleurs pointent leur nez juste après l’Omizutori, comme si la nature elle-même attendait sa bénédiction pour renaître.
Assister au Shuni-e, c’est vivre une leçon d’humilité, de tradition et d’émerveillement. On y vient pour le spectacle, on en repart transformé, apaisé, et parfois un peu roussi par les braises !
📋 Infos pratique : Shuni-e / Omizutori
🎎 Quoi ? | Cérémonie bouddhique millénaire mêlant feu purificateur (Otaimatsu) et eau sacrée (Omizutori) au temple Tōdai-ji de Nara. |
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📅 Quand ? | Tous les ans du 1er au 14 mars. Soirée phare : 12 mars (Otaimatsu vers 19h30, Omizutori autour de 2h du matin). |
📍 Où ? | Nigatsu-dō, pavillon du temple Tōdai-ji, dans le parc de Nara (préfecture de Nara, Japon). |
💰 Tarif | Gratuit. Offrandes bienvenues mais non obligatoires. |
🚉 Accès | Depuis Kyoto ou Osaka : train jusqu’à Nara (ligne JR ou Kintetsu). Environ 20 min de marche ou 10 min de bus jusqu’au Nigatsu-dō. |
👍 Conseils | Arrivez tôt, habillez-vous chaudement, respectez le silence des rituels. Les braises sont une bénédiction, pas une menace ! |
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