🎀 Bondage VS Shibari

D’un cĂŽtĂ©, le bondage, vaste univers hĂ©ritĂ© des pratiques occidentales, de l’autre, le shibari — ou kinbaku — art japonais des cordes.

Bondage VS Shibari

Les 2 font partie de la mĂȘme grande famille, mais l’intention, la culture et les sensations qu’ils procurent diffĂšrent radicalement.

À lire aussi sur dondon.media : Art contemporain japonais

Si tu t’es dĂ©jĂ  demandĂ© oĂč se trouvent les vraies nuances les voici :

🎀BondageShibari
OrigineHĂ©ritage composite : BDSM occidental, cabaret, pin-up, clubs queer, kink mainstreamJapon, issu du hojƍjutsu, transformĂ© en art Ă©rotique codifiĂ©
PortéeTerme large pour toute immobilisation érotique ou sensuelleSous-ensemble centré sur la corde, esthétique et relation
MéthodeApproche libre, bricolage créatif, multi-accessoiresGrammaire précise, séquences codifiées, progression technique
IntentionFonction, plaisir, jeu de pouvoir, esthétique variableForme, connexion émotionnelle, dramaturgie, rythme
MatĂ©rielCordes variĂ©es, chaĂźnes, sangles, menottes, rubans
Cordes naturelles (jute/chanvre) 5–6 mm, 7–8 m
EsthétiqueDépend du couple ou de la scÚneLignes nettes, tension précise, motifs récurrents
ApprentissagePossible en autodidacte avec tutos et pratique prudenteTransmission par ateliers, écoles (ryƫ), maßtre/élÚve
Cadre culturelChambre, club, performance, photoCommunauté, ethos relationnel, respect des rÎles
SécuritéCommunication, consentement, vigilanceIdem, avec rigueur technique et contrÎle constant de la tension

🌏 Des origines aux influences

Le bondage occidental est un terme parapluie qui recouvre toute forme d’immobilisation sensuelle ou Ă©rotique. Cordes, menottes, sangles, rubans, film plastique, chaĂźnes
 tout est possible, pourvu que l’on cherche Ă  contenir, contraindre ou jouer avec le pouvoir. Ses racines sont multiples : le cabaret et la pin-up, les photographies suggestives des annĂ©es 50, la culture cuir, les clubs queer et, plus rĂ©cemment, les reprĂ©sentations mainstream du kink.

shibari

Le shibari, lui, puise dans une tout autre histoire. Le mot « shibari » signifie simplement « attacher », tandis que « kinbaku » se traduit par « lien serrĂ© » ou « intense ». Il prend forme au Japon au XXe siĂšcle, inspirĂ© par les techniques martiales d’entrave appelĂ©es hojƍjutsu. Au fil des dĂ©cennies, ces mĂ©thodes guerriĂšres se transforment en un art Ă©rotique codifiĂ©, pensĂ© pour la performance et la photographie.

Sa transmission suit la logique des arts traditionnels : on apprend auprĂšs d’un maĂźtre (nawashi), dans une Ă©cole (ryĆ«), en rĂ©pĂ©tant des sĂ©quences prĂ©cises (katas), avec le respect des rĂŽles et du rythme.

🎹 MatĂ©riel et esthĂ©tique

Le bondage occidental ne fixe presque aucune rĂšgle en matiĂšre d’outils. Une corde en coton, un harnais en cuir, du bondage tape, des chaĂźnes, des menottes ou mĂȘme un foulard
 tout est permis. L’esthĂ©tique varie Ă©normĂ©ment : certaines scĂšnes privilĂ©gient la simplicitĂ© fonctionnelle, d’autres s’aventurent dans des compositions visuelles sophistiquĂ©es.

À l’inverse, le shibari s’attache presque exclusivement aux cordes naturelles, souvent en jute ou en chanvre, d’un diamĂštre de 5 Ă  6 mm et d’une longueur plus courte qu’en Occident, autour de 7 Ă  8 mĂštres. Leur texture et leur odeur font partie intĂ©grante de l’expĂ©rience. Les motifs sont prĂ©cis et rĂ©pĂ©titifs, les lignes Ă©purĂ©es, la tension calculĂ©e au millimĂštre.

Le but n’est pas seulement d’immobiliser, mais de crĂ©er une Ɠuvre vivante, oĂč chaque dĂ©tail — le chemin de la corde, l’angle d’un nƓud, la posture du corps — compte autant que la finalitĂ©.

💓 Buts et sensations

Le bondage occidental peut ĂȘtre extrĂȘmement polyvalent. Il peut servir Ă  nourrir un jeu de domination, Ă  explorer les sensations physiques — pression, chaleur, engourdissement — ou Ă  produire des images artistiques. Il peut ĂȘtre profondĂ©ment sexuel ou totalement dĂ©sexualisĂ©, comme dans certaines performances scĂ©niques.

Le shibari, lui, vise souvent une connexion Ă©motionnelle intense. On y retrouve cette notion japonaise de ichigo ichie, « l’instant unique », oĂč chaque sĂ©ance est une rencontre qui ne se reproduira jamais de la mĂȘme façon. Le voyage compte autant que le rĂ©sultat : le rythme des frictions, la respiration, le contact des mains, le jeu de tension et de relĂąchement.

Beaucoup parlent du rope space, un état proche de la transe, né de la confiance, des endorphines et de la lente immersion dans les liens.

đŸ› ïž Techniques et apprentissage

Dans le bondage occidental, la technique est ouverte et intuitive. Tu peux improviser avec des nƓuds simples, combiner diffĂ©rents accessoires et styles, sans qu’aucune « police du nƓud » ne vienne te juger. Les bases sont accessibles rapidement, avec quelques tours de corde et un nƓud d’arrĂȘt sĂ»r.

Le shibari, au contraire, repose sur une grammaire prĂ©cise. On y apprend d’abord les fondations — comment faire une single column tie ou une double column tie, comment rĂ©aliser un takatekote — puis on progresse vers des constructions plus complexes et Ă©ventuellement vers la suspension, mais toujours avec un apprentissage encadrĂ©.

La qualité de la tension, la propreté des chemins de corde et la justesse du placement importent plus que la force de la contrainte.

đŸ€ Consentement et cadre culturel

  • Dans le bondage occidental, on s’appuie sur les grands principes du BDSM consensuel : SSC (Safe, Sane, Consensual) ou RACK (Risk-Aware Consensual Kink). Le cadre peut ĂȘtre celui d’une chambre intime, d’un club, d’une play party ou d’une sĂ©ance photo.
  • Le shibari, en plus d’intĂ©grer ces rĂšgles, dĂ©veloppe souvent un ethos relationnel plus marquĂ© : Ă©coute attentive, respect des rĂŽles, apprentissage collectif lors d’ateliers ou de rencontres (rope jams), communication non verbale. Certaines Ă©coles accordent une grande importance Ă  la scĂ©nographie, Ă  la respiration synchronisĂ©e et au silence partagĂ©.

🚹 SĂ©curitĂ© : le point commun vital

Que l’on parle bondage ou shibari, les rĂšgles de sĂ©curitĂ© ne changent pas : le corps ne nĂ©gocie pas. Il faut surveiller la circulation et les nerfs, ĂȘtre attentif aux fourmillements, Ă  l’engourdissement ou Ă  toute perte de force dans un membre.

Une main qui pend mollement est un signal d’alerte : on dĂ©tache immĂ©diatement.

Les zones sensibles — poignets, cou, aisselles, face interne des bras, arriĂšre des genoux — nĂ©cessitent une attention particuliĂšre. Les ciseaux de sĂ©curitĂ© doivent toujours ĂȘtre Ă  portĂ©e, et toute suspension demande une formation sĂ©rieuse ainsi qu’un point d’ancrage testĂ©.

AprĂšs une sĂ©ance, l’aftercare est essentiel : eau, couverture, contact rĂ©confortant, collation, Ă©change sur les ressentis.

💭 DĂ©mystifier quelques idĂ©es reçues

RĂ©duire le shibari Ă  « du bondage joli » est une erreur : il s’agit d’une culture Ă  part entiĂšre, avec son vocabulaire, ses codes et sa philosophie.

Penser que le bondage est moins sĂ»r que le shibari est tout aussi faux : c’est la compĂ©tence, la prĂ©paration et la communication qui garantissent la sĂ©curitĂ©. Contrairement aux clichĂ©s, il n’est pas nĂ©cessaire d’ĂȘtre mince ou souple pour pratiquer, car les positions peuvent toujours ĂȘtre adaptĂ©es.

Quant Ă  la douleur causĂ©e par les cordes, elle n’est pas inĂ©vitable : une bonne technique rĂ©partit la pression et privilĂ©gie des appuis larges.

🧭 Comment se lancer

  • Si tu es curieux·se mais que tu n’as aucun matĂ©riel, commence par apprendre un nƓud de base comme le single column tie et entraĂźne-toi sur un objet solide, comme le pied d’une chaise.
  • Si c’est l’esthĂ©tique du shibari qui t’attire, procure-toi quelques cordes en jute ou en chanvre et cherche un atelier encadrĂ© par un·e enseignant·e expĂ©rimenté·e : voir, sentir et comprendre la tension change tout.
  • Pour un projet photo ou une performance, travaille toujours avec un·e rigger confirmé·e et Ă©tablis un plan prĂ©cis, avec des pauses et des signaux clairs.

📌 Pour ne rien rater de l’actualitĂ© du Japon par dondon.media : suivez-nous via Google ActualitĂ©s, X, E-mail ou sur notre flux RSS.

Auteur/autrice : Louis Japon

Auteur #Actus, #BonsPlans, #Guides, #Culture, #Insolite chez dondon media. Chaque jours de nouveaux contenus en direct du #Japon et en français ! đŸ‡«đŸ‡·đŸ’•đŸ‡ŻđŸ‡”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *