Pourquoi ? Comment ? Et quâest-ce que ça change pour les fans de culture samouraĂŻ ? Voici ce que tu dois savoir.

Tu tâĂ©tais dĂ©jĂ imaginĂ©, ne serait-ce quâune fois, en train de trancher un rouleau de tatami avec un vrai katana au cĆur dâun vieux dojo japonais ? Une scĂšne tout droit sortie dâun animĂ© ou dâun jeu vidĂ©o, version IRL. Tu nâes pas seul.
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Des milliers de visiteurs ont tentĂ© lâexpĂ©rience au fil des annĂ©es, notamment Ă Murayama, haut lieu de lâiaido au Japon. Sauf quâen 2025, cette activitĂ© iconique vient de tirer sa rĂ©vĂ©rence !
| ĂlĂ©ment de lâexpĂ©rience samouraĂŻ | Statut en 2025 | Remarques |
|---|---|---|
| Initiation Ă lâiaido dans un dojo | â | Avec encadrement sĂ©rieux |
| DĂ©monstration de tameshigiri par un maĂźtre | â | En tant que spectateur |
| DĂ©coupe de tatami par un touriste | â | MĂȘme encadrĂ©e, la pratique est bannie |
| Pose photo avec un katana non tranchant | â | Reste populaire pour les souvenirs |
| Possession dâun vrai katana enregistrĂ© | â /â | En respectant les lois sur les armes |
đŻ Murayama, temple discret mais lĂ©gendaire de lâiaido
Murayama, petite ville du nord de HonshĆ«, sâest imposĂ©e ces derniĂšres annĂ©es comme un lieu incontournable pour les passionnĂ©s dâarts martiaux japonais. Elle revendique fiĂšrement ĂȘtre le berceau de lâiaido, cet art martial nĂ© de lâenseignement du sabreur Hayashizaki Jinsuke Shigenobu au XVIá” siĂšcle. Lâiaido, câest lâart de dĂ©gainer et frapper dâun seul mouvement fluide et prĂ©cis. Ă Murayama, on ne se contente pas de lâexpliquer dans les livres : on le fait vivre.
En 2017, la ville a lancĂ© un programme touristique unique mĂȘlant immersion culturelle et Ă©motion forte. On y racontait lâhistoire du sabre, on initiait les visiteurs aux gestes de base, et on finissait en apothĂ©ose par une dĂ©coupe rĂ©elle dâun rouleau de tatami avec un katana bien tranchant. Le tout encadrĂ© par des maĂźtres dâarmes expĂ©rimentĂ©s. CâĂ©tait spectaculaire, intense, presque mystique pour certains. Lâoffre a cartonnĂ©, jusquâĂ devenir un modĂšle repris ailleurs au Japon.
đš Quand la police met fin Ă la coupe
Tout allait bien jusquâĂ la fin de lâannĂ©e 2024. La National Police Agency (NPA), organe central de coordination de toutes les polices japonaises, a publiĂ© une directive qui change la donne. Elle interdit dĂ©sormais aux prĂ©fectures de proposer des activitĂ©s touristiques dans lesquelles des personnes non initiĂ©es manipulent des sabres affĂ»tĂ©s, mĂȘme sous surveillance.
Ce changement nâest pas anodin. Il repose sur la loi trĂšs stricte de 1958 concernant les armes Ă feu et les sabres. Cette loi, toujours en vigueur, considĂšre que la possession et lâusage de tels objets doivent ĂȘtre exceptionnels, trĂšs encadrĂ©s, et jamais anodins. Pour les autoritĂ©s, autoriser des groupes de touristes Ă manipuler de vraies lames, mĂȘme quelques minutes, câest une faille trop grande dans leur systĂšme de sĂ©curitĂ©. Le Japon prĂ©fĂšre prĂ©venir que guĂ©rir, et le souvenir dâun accident nâa pas sa place dans une politique oĂč la tolĂ©rance zĂ©ro est la rĂšgle.
La dĂ©cision de la NPA a immĂ©diatement gelĂ© les programmes comme celui de Murayama. LĂ -bas, les visiteurs ne touchent plus aux sabres tranchants. Le tameshigiri, ce moment intense de coupe rĂ©elle, est dĂ©sormais uniquement rĂ©alisĂ© par les maĂźtres. Les participants, eux, assistent Ă la dĂ©monstration, sâessayent aux gestes de base avec un iaito ou un bokken, et repartent avec une photo souvenir⊠mais sans avoir rĂ©ellement tranchĂ© quoi que ce soit.
Partout au Japon, dâautres villes et dojos ont pris les mĂȘmes mesures. Certains ont carrĂ©ment annulĂ© leur offre âsamouraĂŻ pour une matinĂ©eâ, faute dâintĂ©rĂȘt sans la fameuse coupe finale. Dâautres essaient de maintenir lâillusion, mais prĂ©cisent dĂ©sormais, en tout petit, que les lames ne sont plus rĂ©elles.
đ Pourquoi le Japon serre la vis sur les sabres
Pour comprendre cette dĂ©cision, il faut revenir sur le rapport trĂšs particulier que le Japon entretient avec les armes. Dans un pays oĂč la criminalitĂ© est extrĂȘmement basse, chaque outil potentiellement dangereux est rĂ©glementĂ© Ă lâextrĂȘme. PossĂ©der un sabre traditionnel, câest possible, mais cela implique un enregistrement officiel, une conservation prĂ©cise, et une surveillance stricte. MĂȘme les rĂ©pliques dĂ©coratives doivent ĂȘtre conformes. En 2024, par exemple, plusieurs centaines dâĂ©pĂ©es de collection inspirĂ©es de lâunivers Harry Potter ont Ă©tĂ© rappelĂ©es, car considĂ©rĂ©es comme trop affĂ»tĂ©es.
Laisser un touriste fraĂźchement dĂ©barquĂ©, sans formation, manipuler un shinken (katana tranchant), mĂȘme cinq minutes dans un dojo, est perçu par lâĂtat japonais comme un risque dĂ©mesurĂ©. Dans ce contexte, les offres touristiques type âviens dĂ©couper un rouleau pour la photoâ nâont plus leur place.
đ Murayama se rĂ©invente, mais perd un peu de sa magie
Le coup est dur pour Murayama. Le programme de tameshigiri attirait chaque annĂ©e des centaines de visiteurs Ă©trangers, loin des grands circuits classiques. Il faisait vivre les maĂźtres locaux, dynamisait la rĂ©gion, et offrait une expĂ©rience bien plus authentique quâun simple musĂ©e. Aujourdâhui, la ville continue Ă proposer des cours dâiaido. On y dĂ©couvre toujours lâhistoire, les gestes, la philosophie du sabre. Mais lâinstant tant attendu de la coupe nâest plus au programme. Le selfie avec un sabre est toujours possible, mais sans adrĂ©naline, ni tranche nette.
Les responsables du tourisme local reconnaissent eux-mĂȘmes une baisse dâintĂ©rĂȘt. Dâautres dojos, notamment dans la prĂ©fecture dâAkita, signalent aussi une chute des rĂ©servations depuis quâils ont dĂ» retirer la partie âlive cuttingâ.
đ§ł Ce que tu peux (encore) faire en 2025
Heureusement, le Japon ne ferme pas complĂštement la porte Ă ton rĂȘve de sabre. Tu peux toujours pratiquer lâiaido ou le battodo si tu es inscrit dans un dojo, que tu respectes les rĂšgles, et que tu es encadrĂ© sĂ©rieusement. Tu peux Ă©galement possĂ©der un katana enregistrĂ© Ă des fins artistiques ou de collection, ou assister Ă des dĂ©monstrations impressionnantes rĂ©alisĂ©es par des experts. En revanche, la version âexpĂ©rience express pour touristeâ oĂč tu rĂ©serves ton crĂ©neau sur un site et repars avec une vidĂ©o au ralenti dâune coupe, ça, câest terminĂ©.
Les programmes samouraĂŻ Ă©voluent donc. Aujourdâhui, ils se concentrent sur lâapprentissage, lâesthĂ©tique du geste, la symbolique du sabre. LâidĂ©e nâest plus de trancher, mais de comprendre.
đ§ Pourquoi ça fait dĂ©bat
Ce changement divise. Dâun cĂŽtĂ©, certains estiment que manipuler une arme tranchante sans expĂ©rience, mĂȘme briĂšvement, Ă©tait une mauvaise idĂ©e dĂšs le dĂ©part. Pour eux, la tradition mĂ©rite respect, rigueur, et ne doit pas se transformer en attraction de parc Ă thĂšme. De lâautre, beaucoup de jeunes voyageurs, fans de culture japonaise, vivent cette dĂ©cision comme un coup dur. Ils y voyaient une chance unique de se connecter physiquement Ă lâunivers quâils aiment, loin des vitrines et des musĂ©es.
La vĂ©ritĂ©, sans doute, se trouve entre les deux. Le Japon protĂšge un hĂ©ritage martial ancien, mais cherche aussi Ă rĂ©pondre Ă une demande touristique mondiale. Pour que les deux cohabitent, il faudra trouver un Ă©quilibre. Et cela demandera, peut-ĂȘtre, de rĂ©ajuster nos attentes.
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