La prochaine fois que tu verras un panneau “ネットカフェ” à Tokyo ou Kyoto, ne le prends pas pour un vestige du passé.

Derrière une porte discrète au fond d’un couloir éclairé au néon, se cache un espace étonnant : un fauteuil, un écran, la climatisation douce, et surtout… café, soda et glace à volonté.
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Les net cafés japonais, longtemps associés à un Internet d’un autre temps, vivent une seconde jeunesse. Entre coworking improvisé, refuge temporaire et hôtel économique, ces cabines sont devenues un monde parallèle à part entière.
🕰️ Retour sur l’histoire peu ordinaire des net cafés japonais
Tout commence dans les années 1980 avec les manga kissa – littéralement « salons de thé à mangas ». Les Japonais viennent y lire, parfois pendant des heures. Puis arrivent les ordinateurs, le Wi-Fi, et ces lieux se transforment en net cafés, mélange de bibliothèque geek et de cybercafé.
Dans les années 2000, ils deviennent des refuges nocturnes pour les salarymen qui ont raté le dernier train. On y fume, on y dort dans un fauteuil, on grignote des snacks achetés à l’accueil. L’ambiance est tamisée, parfois crasseuse, souvent masculine.
Mais rapidement, ces lieux révèlent une autre facette : celle d’un refuge de précarité. Certains y dorment tous les soirs, faute de pouvoir se payer un loyer. En 2007, le gouvernement japonais recense plus de 5 000 personnes vivant régulièrement dans ces cabines. C’est de là que naît le terme net café refugees.
📉 Déclin… et la mue récente
À partir des années 2010, tout change. Avec les smartphones et Internet illimité à domicile, plus besoin de se déplacer pour se connecter. Les net cafés ferment les uns après les autres.
Mais certaines chaînes, comme Kaikatsu Club, refusent de disparaître. Elles repensent totalement le concept. Plutôt que de vendre du temps sur un ordinateur, elles proposent une nouvelle forme d’hospitalité, à mi-chemin entre l’hôtel, le coworking et l’espace de détente.
Aujourd’hui, ces lieux ne se présentent plus comme de simples cybercafés. Ils deviennent des endroits multifonctionnels où dormir, travailler, manger, se doucher… ou simplement être seul un moment.
🛏️ Passer la nuit entre confort et discrétion
Passer la porte d’un Kaikatsu Club, c’est entrer dans un univers très codifié. À l’accueil, on choisit sa formule : quelques heures ou la nuit entière. Une clé ou un badge donne ensuite accès à un labyrinthe de cabines privées.
Chaque espace est équipé d’un fauteuil ou d’un matelas au sol, d’un écran (PC ou télé), du Wi-Fi, de prises électriques. À quelques pas, un drink bar propose boissons chaudes et froides à volonté, parfois même de la glace en libre-service.
Des douches sont disponibles à l’étage. Certaines succursales proposent aussi des machines à laver, des plats chauds (curry, ramen) ou des snacks. Le tout pour un prix modique : entre 1 500 et 3 000 yens la nuit, soit bien moins cher qu’un hôtel ou même un capsule hotel.
Dans sa version la plus récente, le net café propose aussi des cabines entièrement privatives, avec porte verrouillée, murs jusqu’au plafond, voire console de jeu. Ce n’est plus un simple café : c’est un logement temporaire ultra-fonctionnel.
👩💻 Relooking pour attirer plus de femmes
L’univers des net cafés a longtemps été perçu comme masculin, voire un peu glauque. Pour attirer un nouveau public, notamment féminin, les grandes chaînes ont opéré un véritable rebranding.
Des étages réservés aux femmes ont vu le jour, avec accès sécurisé. Les douches et toilettes féminines sont équipées de miroirs lumineux, de lisseurs, de produits de soin. Les cabines sont plus lumineuses, les fauteuils plus confortables, l’ambiance plus sereine.
Ce changement a porté ses fruits. Des femmes seules viennent aujourd’hui s’y reposer, travailler ou lire en toute tranquillité. Mio, notre blogueuse de départ, y passe plusieurs heures par semaine pour écrire, loin des distractions de son domicile.
👥 Le monde dans une boîte
Dans ces petits espaces cloisonnés, mille vies se croisent. Un étudiant révise pour ses examens. Un livreur dort quelques heures avant sa prochaine tournée. Une touriste fauchée teste l’expérience pour son vlog. Un salarié évite de rentrer chez lui. Et Mio continue son blog.

Les net cafés sont devenus des refuges urbains anonymes, parfaitement adaptés à la vie moderne japonaise, où l’espace privé est rare et l’intimité difficile à préserver.
Malgré leur relooking, l’ombre des net café refugees plane toujours. Certains travailleurs précaires continuent d’y dormir chaque nuit, sans adresse fixe, sans contrat de location. Le filet de sécurité est mince, mais il existe.
🎒 Si tu veux tenter l’expérience…
Une nuit dans un net café, c’est un peu comme tester une version compressée du Japon urbain. Voici à quoi t’attendre, en pratique :
En arrivant, tu choisis la durée de ton séjour. Si tu es une femme, tu peux demander une cabine dans une zone réservée. Tu choisis ton type de siège : fauteuil inclinable, matelas, cabine double ou privée.
Tu auras accès aux mangas, aux magazines, aux boissons et, dans certaines succursales, à des douches bien équipées. À la sortie, tu payes en fonction du temps passé et de ce que tu as consommé.
Ce n’est pas un hôtel de luxe, mais c’est étonnamment pratique, sûr et accessible, surtout si tu voyages avec un budget serré.
🔮 Et maintenant ?
Face à la montée en puissance des hôtels capsules design, des coworkings branchés et des applis de réservation, les net cafés ont peu de marge de manœuvre. Mais ils ont un atout que personne ne propose aussi bien : la combinaison de services dans un même espace, à toute heure.
Ils pourraient devenir les tiers-lieux urbains de demain : des micro-hubs où travailler la nuit, dormir entre deux shifts, ou juste se mettre en pause.
Tant qu’il y aura une prise pour son ordinateur et du café gratuit, Mio continuera de s’installer dans sa cabine Kaikatsu. Elle n’est ni chez elle, ni au bureau, mais quelque part entre les deux.
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