Parce qu’il creuse inlassablement une humanité, délicate et incarnée, capable de glisser du tendre à l’inconfort, du banal au bouleversant.

Né à Tokyo en 1962, Kore‑eda grandit dans un foyer où sa mère le sensibilise tôt au cinéma occidental – Ingrid Bergman, Joan Fontaine ou Vivien Leigh deviennent autant de repères émotionnels.
Après des études à l’université Waseda, il s’oriente vers le documentaire, rejoignant en 1991 la troupe TV Man Union. Là, surgit sa sensibilité pour les récits vrais, les trajets intimes et les confidences silencieuses.
🎬 Le passage à la fiction et la naissance d’une signature
En 1995, il dévoile Maborosi, son premier long métrage. Cette œuvre sensible et presque silencieuse marque les débuts d’un style porté sur la contemplation des émotions enfouies. Proche des questionnements de la mémoire et de la perte, ce film annonce déjà les thèmes qui feront sa profondeur – la fragilité des rapports humains, le poids du passé, la beauté de l’instant suspendu.
🌿 L’art de filmer l’invisible au cœur de la famille
Chaque film de Kore‑eda est comme un souffle discret : After Life (1998) tisse un pont entre vie et souvenir ; Nobody Knows (2004) explore l’abandon chronique via la force d’enfants livrés à eux-mêmes ; Still Walking (2008) scrute les regrets d’une famille ordinaire, et Like Father, Like Son (2013) décortique la filiation, la sève intime du lien parent‑enfant. Sa caméra capte à merveille ce qui échappe au regard : un bol posé, un geste arrêté, une émotion retenue.
Kore‑eda fait de la Croisette son jardin secret : il y remporte le Prix du Jury en 2013 pour Like Father, Like Son, puis la Palme d’or en 2018 avec Une affaire de famille (Shoplifters), portrait sensible d’une tribu aux valeurs incertaines mais au cœur éclatant. En 2023, avec Monster, il reçoit la Queer Palm et le Prix du scénario grâce à cette nouvelle plongée dans ces bulles familiales, entre malentendus et blessures profondes.
🌍 Horizons internationaux et nouveaux territoires
En 2019, The Truth le voit franchir l’Europe, diriger Catherine Deneuve, Juliette Binoche et Ethan Hawke dans une fresque mère‑fille vibrante. Puis en 2022‑2023, il s’aventure en Corée du Sud avec Broker, tissant un style humain universel, où les émotions dépassent les frontières culturelles. Et bien que toujours profondément japonais, il réussit l’équilibre entre ancrage et ouverture.
Kore‑eda n’hésite plus à voguer au-delà du cinéma : en 2023, The Makanai, sur Netflix, nous emmène dans l’univers feutré des maiko de Kyoto. En 2025, il lance Asura, adaptation contemporaine d’une série familiale japonaise des années 70, filmée en 35 mm et portée par des héroïnes fortes et complexes, pointant les dynamiques de genre et de pouvoir dans la société japonaise.
🧠 Un regard, une éthique, un style
Son cinéma se nourrit d’une caméra immobile, toujours attentive, d’une écriture serrée, attachée aux non‑dits, aux respirations des dialogues et aux silences qui en disent plus que tout. Ses récits sont souvent inspirés de sa propre vie – comme le deuil familial vécu dans Still Walking – et ancrés dans la mémoire, les blessures intimes, les tabous sociaux. Pour Kore‑eda, filmer, c’est écouter.
Ses acteurs – Lily Franky, Sakura Andô, Susumu Terajima – sont fidèles, incarnés, vrais. Il faut y revenir pour la sensation de reconnaissance, de douceur intuitive face à nos fragilités, de communion avec ces vies ordinaires qui s’élèvent sous sa caméra.
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