🗑️ Shibuya fait payer les poubelles

Une décision qui dépasse la simple question de propreté : Shibuya redéfinit les règles du vivre-ensemble dans l’espace public.

shibuya fait payer les poubelles

le célèbre arrondissement de Shibuya s’apprête à transformer radicalement sa gestion des déchets.

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À partir d’avril 2026, les commerces à emporter devront installer et entretenir leurs propres poubelles sous peine d’amende.

La fin du “chacun reprend ses déchets” : vers une contrainte assumée

Pendant longtemps, la ville de Shibuya s’appuyait sur une maxime simple : chacun est responsable de ses déchets. Une règle morale, certes efficace dans une société disciplinée, mais de plus en plus mise à l’épreuve. Depuis la fin de la pandémie, la fréquentation explose, en particulier celle des touristes et des adeptes du takeout.

Face à l’augmentation des détritus dans les rues de Harajuku, Ebisu ou Shibuya, l’arrondissement a choisi une autre voie. Dès 2026, les établissements de vente à emporter seront obligés de gérer la collecte des déchets générés par leur activité. Les contrevenants s’exposent à une amende pouvant aller jusqu’à 50 000 yens, et les usagers peu scrupuleux, à une pénalité moyenne de 2 000 yens pour tout dépôt sauvage.

Une responsabilité élargie pour les commerces de rue

Convenience stores, cafés, fast-foods, distributeurs de boissons… Tous ces points de vente ont un point commun : ils transforment le trottoir en salle à manger, sans offrir de solution pour les déchets générés. En ciblant ces acteurs, Shibuya applique une logique de responsabilité élargie du producteur, adaptée au contexte urbain.

Mais cette obligation soulève une tension bien connue : une poubelle attire tous les déchets, pas seulement ceux du commerce qui l’installe. Mélanges, débordements, sacs ménagers déposés à la volée… Plusieurs établissements ont déjà tenté l’expérience, pour finalement retirer leurs bacs. L’arrondissement parie aujourd’hui que la contrainte réglementaire créera un réseau assez dense pour éviter le jet au sol.

Pourquoi Shibuya refuse de multiplier les poubelles publiques

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la mairie de Shibuya ne prévoit pas d’installer de nouvelles poubelles publiques. Non par manque de volonté, mais par choix politique et budgétaire. Selon le maire, « les déchets issus de la vente doivent être pris en charge par ceux qui vendent ». Autrement dit, pas de mobilier urbain supplémentaire au service du tourisme, mais une régulation des pratiques commerciales.

Une poubelle « standard » coûte environ 200 000 yens sans même compter la collecte, le nettoyage ou le tri. À Shibuya, où les déchets s’accumulent vite, cela représente un service coûteux et constant, difficile à étendre sans révision des priorités budgétaires.

Héritage sécuritaire et culture du jetable : un équilibre difficile

Le retrait massif des poubelles au Japon ne date pas d’hier. Après l’attentat au gaz sarin en 1995, le pays a renforcé sa doctrine sécuritaire : moins d’objets abandonnés, moins de risques. Depuis, les réintroductions ont été rares et souvent ponctuelles, freinées par les attentats à l’étranger et une méfiance persistante envers les “objets suspects”.

Dans ce contexte, Shibuya fait face à une double injonction : maintenir une ville propre avec très peu d’équipements publics, tout en absorbant un tourisme nomade qui produit des déchets en mouvement. Le résultat ? Un choc des normes entre visiteurs qui cherchent instinctivement une poubelle, et une ville qui attend d’eux une autodiscipline silencieuse.

La technologie comme alternative : des poubelles intelligentes

Pour sortir de cette impasse, certaines villes japonaises expérimentent des poubelles “smart”. C’est le cas des modèles SmaGO, capables de compresser les déchets, d’envoyer des alertes lorsqu’ils sont pleins, et de faciliter la planification des tournées de collecte.

Shibuya n’est pas en reste : le quartier teste déjà ces équipements dans certains lieux stratégiques comme Shibuya Fukuras. L’objectif ? Allier propreté, sobriété de moyens humains, et efficacité technique.

Une tentative de reprogrammer les comportements urbains

Derrière l’amende et les obligations, ce que tente vraiment Shibuya, c’est un changement de culture collective. Pendant des années, la propreté reposait sur une triple alliance implicite : peu de mobilier, beaucoup d’autodiscipline, et des agents de nettoyage très présents.

Mais face au tourisme de masse, cette alliance ne tient plus. L’arrondissement propose donc un nouveau contrat social : si tu vends du jetable, tu dois offrir un moyen de le jeter proprement. Plus encore, tu dois le gérer toi-même.

En toile de fond, une interrogation plus large : la propreté urbaine doit-elle rester une morale privée, ou devenir une infrastructure publique ? Shibuya commence à apporter sa réponse.

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Auteur/autrice : Louis Japon

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