L’histoire complexe des relations entre la CIA, les Yakuza et le Parti libéral démocrate (PLD) est un chapitre méconnu de l’histoire nippone.

⚡ Le livre Legacy of Ashes de Tim Weiner propose une plongée glaçante dans les actions de la CIA à travers le monde – et notamment au Japon. Une lecture essentielle pour comprendre les rouages de ces stratégies. Les opinions et conclusions exprimées dans ce livre ne sont pas nécessairement partagées par tous les experts ou observateurs de la politique étrangère des États-Unis.
L’histoire du Japon d’après-guerre ne se résume pas à sa renaissance économique spectaculaire ou à sa stabilité politique exemplaire. Elle cache aussi des réseaux d’alliances inattendus, tissés dans l’ombre entre la CIA, la pègre japonaise et les fondateurs du Parti libéral-démocrate (PLD).
Ce pan méconnu de l’histoire illustre les compromis risqués faits au nom de la lutte contre le communisme. Entrons dans les coulisses de ces liaisons dangereuses.
🗾 Le Japon en 1945 : un terrain de jeu géopolitique
Après la défaite de 1945, le Japon est un pays en ruines, politiquement instable et économiquement affaibli. Pour les États-Unis, il devient un pion stratégique dans la lutte contre l’expansion soviétique en Asie. C’est dans cette optique que la CIA s’implique directement dans la reconstruction du paysage politique nippon. Son objectif ? Créer un gouvernement stable, pro-américain et résolument anticommuniste.
Pour y parvenir, elle s’associe avec des figures à la moralité douteuse, mais à l’influence bien réelle.
👤 Yoshio Kodama : du crime de guerre à l’art de l’influence
Parmi les personnages-clés de cette époque trouble, Yoshio Kodama se démarque. Nationaliste fervent, criminel de guerre et homme d’affaires sulfureux, il est arrêté mais rapidement libéré grâce à l’intervention des services secrets américains. Ces derniers voient en lui un rempart utile contre les mouvements communistes.
Kodama utilise sa fortune colossale – acquise en grande partie via des trafics durant la guerre – pour financer la création du PLD en 1955. Grâce à ses liens avec les Yakuza, il devient un véritable « kuromaku », un homme de l’ombre orchestrant les alliances entre politique, affaires et crime organisé.
🎩 Nobusuke Kishi : un Premier ministre façonné par l’ombre
Autre figure controversée : Nobusuke Kishi. Lui aussi détenu pour crimes de guerre, il sort de prison sans procès. Soutenu financièrement et logistiquement par la CIA, il grimpe les échelons pour devenir Premier ministre en 1957. Pendant son mandat, il renforce l’alliance américano-japonaise, notamment à travers la révision du traité de sécurité bilatéral.
Mais cette décision déclenche les gigantesques manifestations Anpo. Pour contenir la contestation, Kishi fait appel à Kodama… qui mobilise plusieurs milliers de Yakuza afin d’assurer l’ordre public, avec la bénédiction tacite des autorités américaines.
💰 Un financement occulte à grande échelle
Derrière le rideau politique, la CIA injecte secrètement des millions dans le PLD. Des fonds clandestins, comme le M-Fund, permettent de financer les campagnes électorales, mais aussi de rémunérer les « alliés » de l’ombre comme Kodama. En retour, ces derniers redistribuent l’argent à des figures politiques influentes et aux groupes criminels alliés.
Par ailleurs, des opérations de contrebande – notamment autour du tungstène – servent à générer des revenus discrets destinés à soutenir ces réseaux d’influence.
✈️ L’affaire Lockheed : un scandale qui éclaire les ténèbres
Dans les années 1970, le scandale Lockheed met en lumière ces relations troubles. L’enquête révèle que Kodama a perçu des millions de dollars pour faciliter la vente d’avions américains au Japon, en versant des pots-de-vin à de hauts responsables, dont le Premier ministre Kakuei Tanaka. Cette affaire déchire l’opinion publique et met en lumière le mélange toxique de politique, de business et de crime organisé.
Malgré les scandales, le PLD reste le pilier de la vie politique japonaise. Les Yakuza, bien que plus discrets aujourd’hui, conservent une emprise sur certains secteurs économiques et sociaux. Quant à la CIA, son rôle dans la consolidation de la droite japonaise demeure un sujet d’étude et de controverse.
Ces alliances, forgées dans la précipitation de la guerre froide, rappellent que la stabilité peut parfois reposer sur des fondations… moralement ambiguës !
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