🎭 Takeshi Kitano : L’homme aux mille visages

Il y a des artistes dont l’aura dépasse les frontières de leur art. Des créateurs dont l’œuvre protéiforme, défie les classifications.

Takeshi Kitano

Humoriste, acteur, réalisateur, écrivain, peintre… Son existence est une perpétuelle oscillation entre le chaos et la rigueur, entre le burlesque et le tragique, entre l’absurde et l’ultraviolence. À la fois maître du rire et poète de la mélancolie, il navigue entre les genres avec une insolence crasse.

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Retour sur quelques uns de ses films cultes !

🎤 L’art du manzai : naissance d’un provocateur

Takeshi Kitano n’a pas toujours été ce cinéaste contemplatif que l’on associe à des films comme Hana-Bi ou Sonatine. Avant d’embrasser la rigueur du cinéma, il était le chaos incarné. Un gamin d’Asakusa, formé à l’école des cabarets et des nuits enfumées, dont l’ambition se résumait à faire rire.

C’est dans cet univers qu’il découvre le manzai, un style d’humour japonais où le dialogue se joue à deux : l’un est le sérieux, l’autre l’idiot. Kitano, bien sûr, choisira le rôle du décalé, du provocateur, du trublion. Avec son complice Nirô Kaneko, il forme The Two Beats, et se fait un nom sous le pseudonyme Beat Takeshi.

Dès ses débuts, son humour choque. Il s’attaque aux tabous, ridiculise les puissants, joue avec les limites du bon goût. Le public adore. Les autorités, moins. Mais Kitano s’en moque. Il n’a jamais été du genre à demander la permission.

🎬 Violent Cop : le premier pas vers la radicalité

Puis vient le cinéma. Pas un choix délibéré, plutôt une bifurcation inattendue. Un rôle sérieux dans un film policier, puis un coup du destin : un réalisateur qui abandonne le tournage, et Kitano qui prend les commandes.

C’est ainsi qu’il réalise Violent Cop (1989), son premier film, et impose instantanément sa grammaire cinématographique. Des silences qui en disent plus que les dialogues. Des éclats de violence aussi soudains que brutaux. Un monde froid, déshumanisé, où la violence est une fatalité, non un spectacle.

On est loin des comédies absurdes qui l’ont fait connaître. Kitano entre dans le cinéma comme on entre en guerre.

🔥 Hana-Bi : la beauté dans la destruction

Les années 90 sont celles de la consécration. Avec Sonatine, Kids Return, et surtout Hana-Bi, il atteint un équilibre rare, une alchimie entre le macabre et le sublime.

Dans Hana-Bi, il incarne un ancien flic, usé par la vie, condamné par un engrenage qu’il ne cherche même plus à fuir. Le film est un tableau mouvant, où chaque plan est une explosion silencieuse de mélancolie. La violence n’y est jamais gratuite : elle est le dernier recours, le cri primal d’un monde qui ne sait plus comment exister autrement.

Le film remporte le Lion d’Or à la Mostra de Venise. Le monde découvre Kitano. Kitano, lui, reste insaisissable.

🩸 Battle Royale, Zatoichi : le mythe se réinvente

Mais Kitano ne se laisse pas enfermer. Il joue avec son image, la déconstruit, la remodèle.

Dans Battle Royale (2000), il devient une figure quasi mythologique : un professeur sadique, arbitre d’un jeu de massacre absurde, incarnation glaciale de l’autorité dévoyée.

Puis, en 2003, il revisite Zatoichi, le célèbre samouraï aveugle. Mais, évidemment, à sa manière : un film hybride, où l’humour côtoie la violence stylisée, où les combats sont des ballets sanglants, où la tradition est dynamitée avec une élégance déconcertante.

Son visage, figé par l’accident, est à l’image de son œuvre : une fracture qui est devenue un style. Kitano n’imite pas. Il détruit et reconstruit. Dans un monde où tout doit être catégorisé, Kitano demeure une anomalie. Une énigme qui, film après film, tableau après tableau, continue de nous hanter. Et c’est peut-être ça, le véritable génie : ne jamais se laisser enfermer.

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