Luis Frois arriva au Japon en 1563, au début de la période des contacts entre l’Europe et le Japon et y décrit alors les japonais.
En 1585, le missionnaire jésuite portugais Luis Frois rédigea un ouvrage pionnier intitulé Traité sur les contradictions et différences de mœurs entre Européens et Japonais.
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Cet ouvrage constitue la première comparaison systématique des cultures occidentale et japonaise, offrant un témoignage précieux sur la rencontre entre l’Europe et le Japon au XVIème siècle.
Contexte historique
Les premiers Européens avaient débarqué accidentellement sur l’île de Tanegashima en 1543, ouvrant ainsi l’ère du commerce Nanban (terme japonais signifiant « barbares du sud »).
Les missionnaires jésuites, dont François Xavier, commencèrent leur évangélisation en 1549, établissant les premières relations culturelles et religieuses entre les 2 mondes. Luis Frois, prêtre jésuite portugais, arriva au Japon en 1563 et y passa 34 ans jusqu’à sa mort en 1597.
Cette période fut marquée par des échanges intenses, tant sur le plan commercial que culturel. Les Européens introduisirent au Japon des armes à feu, des technologies et de nouvelles idées religieuses, tandis qu’ils découvraient une civilisation japonaise riche et sophistiquée.
Comme ses prédécesseurs jésuites, Frois perçut le Japon comme une terre de mission prometteuse. Il considérait les Japonais comme particulièrement aptes à embrasser le christianisme, notant leur intelligence, leur politesse et leur capacité à suivre la raison.
Frois réussit à établir des contacts avec d’importants dirigeants japonais. Sa rencontre avec Oda Nobunaga en 1569 fut particulièrement marquante et contribua à sa célébrité au Japon.
Frois développa une profonde connaissance et un grand intérêt pour la société japonaise. Il servit d’interprète et rédigea de nombreux écrits sur le Japon. Sa curiosité et son désir de comprendre la culture locale transparaissent dans ses observations détaillées.
Le traité de Frois est la première description détaillée de la société japonaise par un Européen. Il se compose de plus de 600 observations concises comparant divers aspects des deux cultures :
- Apparence physique et vêtements
- Coutumes des femmes et des enfants
- Religion et temples
- Alimentation
- Armes et guerre
- Écriture et littérature
- Architecture et jardins
- Arts et divertissements
Il offre un aperçu unique de la société japonaise à la veille de la période Edo, juste avant la fermeture du pays aux influences étrangères sous le shogunat Tokugawa.
Son traité est considéré comme l’une des premières tentatives de compréhension interculturelle. Il a influencé les écrits ultérieurs sur le Japon et demeure une référence pour les historiens et anthropologues intéressés par les interactions entre l’Occident et l’Orient.
Frois décrit avec étonnement, parfois teinté d’incompréhension, les particularités de la vie quotidienne japonaise. Dans son œuvre, il écrit :
« Beaucoup de leurs coutumes sont si éloignées, étrangères et différentes des nôtres qu’il est difficile de croire qu’on puisse trouver de tels contrastes entre nous et des gens si civilisés.«
Bien que reflétant parfois les préjugés de son époque, l’ouvrage de Frois est une source inestimable pour comprendre la perception mutuelle entre Européens et Japonais. Frois y souligne les différences frappantes entre les 2 civilisations de l’époque dont nous avons compilé les principales observations ci-dessous.
Différences d’apparence et vêtements des hommes japonais
Les Européens sont généralement grands et bien bâtis, tandis que les Japonais sont souvent plus petits et moins robustes. En Europe, de grands yeux sont considérés comme un signe de beauté, alors qu’au Japon, ce sont les yeux étroits qui sont valorisés. De même, les yeux clairs sont courants en Europe, mais rares et perçus comme étranges au Japon.
Les traits du visage diffèrent également. Les Européens ont souvent des nez longs et aquilins, tandis que les Japonais ont des nez plus courts avec de petites narines. La pilosité faciale est une autre distinction : les Européens arborent généralement des barbes fournies, alors que les Japonais ont des barbes clairsemées.
En ce qui concerne les coiffures, les hommes européens gardent leurs cheveux coiffés et considèrent comme une offense de les couper. Au Japon, les hommes enlèvent leurs cheveux avec des pincettes, malgré la douleur que cela peut causer. Une petite touffe de cheveux attachée à l’arrière de la tête est même une source de fierté pour les Japonais.
Les habitudes vestimentaires varient également. Les Européens s’habillent de manière similaire tout au long de l’année, tandis que les Japonais changent de tenue selon les saisons, adoptant le Natsu-katabira en été, l’Aki-awase en automne et le Fuyu-kimono en hiver.
Les tissus imprimés sont rares en Europe et parfois considérés comme excentriques, alors qu’au Japon, ils sont couramment portés par tous, à l’exception des bonzes et des hommes âgés au crâne rasé. De plus, les modes vestimentaires européennes changent fréquemment, presque chaque année, tandis qu’au Japon, les styles restent constants.
Les armes traditionnelles diffèrent entre les deux cultures. Les Européens utilisent des épées à double tranchant, testées sur du bois ou des animaux, alors que les Japonais préfèrent des sabres à un seul tranchant, qu’ils testent parfois sur des cibles spécifiques.
En matière de loisirs, la promenade est prisée en Europe pour son aspect sain et apaisant, mais les Japonais ne pratiquent pas cette activité et la trouvent même étrange.
Différences d’apparence et coutumes des femmes japonaises
La perception de la beauté féminine présente des contrastes notables. En Europe, la chasteté est considérée comme l’honneur suprême d’une jeune femme, alors qu’au Japon, la perte de la virginité ne nuit ni à l’honneur ni aux perspectives de mariage. Les femmes européennes valorisent les cheveux blonds et les coiffent en les séparant au niveau du front. À l’inverse, les Japonaises préfèrent teindre leurs cheveux en noir, se rasent le front et dissimulent la raie.
Les pratiques de maquillage diffèrent également. Les Européennes cherchent à appliquer leur maquillage de manière discrète, tandis que les Japonaises estiment que plus il y a de couches de poudre blanche, plus c’est distingué. En matière de soins dentaires, les femmes en Europe utilisent des méthodes pour blanchir leurs dents, alors que les Japonaises utilisent des techniques pour noircir leur bouche et leurs dents.
Les rôles sociaux montrent aussi des différences. En Europe, les hommes marchent devant et les femmes derrière, alors qu’au Japon, c’est l’inverse. Les biens sont détenus en commun par le mari et la femme en Europe, tandis qu’au Japon, chacun possède ses propres biens, et il arrive que la femme prête au mari à des taux d’intérêt élevés. De plus, les femmes européennes ne quittent jamais la maison sans la permission de leur mari, alors qu’au Japon, les femmes sont libres d’aller où bon leur semble.
Différences pour les enfants et l’éducation
L’éducation des enfants présente des distinctions significatives. En Europe, les enfants dorment dans des berceaux et utilisent des chariots pour apprendre à marcher. Au Japon, ces dispositifs sont inexistants, et les enfants comptent sur les aides naturelles pour leur développement. La discipline est également abordée différemment : les Européens trouvent normal de punir un enfant, alors que les Japonais privilégient les réprimandes verbales.
Les méthodes d’apprentissage varient aussi. Les enfants européens apprennent d’abord à lire puis à écrire, tandis qu’au Japon, l’écriture est enseignée en premier. En Europe, les enfants sont élevés avec beaucoup de gentillesse et bénéficient de bonne nourriture et de vêtements, alors qu’au Japon, ils grandissent souvent à moitié nus et sans les mêmes attentions.
Différences des pratiques sociales et morales
Les réactions face aux pertes matérielles diffèrent également. Les Européens montrent beaucoup d’émotion lorsqu’ils perdent leurs biens ou que leurs maisons brûlent, alors que les Japonais semblent prendre ces situations avec détachement. Traiter quelqu’un de menteur est une grave offense en Europe, mais est pris à la légère au Japon.
Les attitudes envers la justice varient aussi. En Europe, seules les autorités ont le droit de punir sévèrement, et les crimes sont jugés selon la loi. Au Japon, les règles peuvent être plus strictes, avec des punitions sévères même pour de petits vols.
Différences des loisirs et des interactions sociales
Les jeux et les loisirs montrent des différences culturelles. Les Européens jouent au ballon en utilisant leurs mains et frappent la balle haut contre le mur. Les Japonais jouent avec leurs pieds et gardent la balle plus près du sol. Les Européens s’embrassent lorsqu’ils se rencontrent ou se quittent, une pratique inexistante au Japon où cela peut même susciter des rires.
En Europe, les gens socialisent et se divertissent dans les places publiques et les rues. Au Japon, les interactions sociales se déroulent principalement dans les maisons, les rues étant utilisées principalement pour se déplacer.
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